L’invité

  • Titre du livre: L’invité
  • Auteur: HWANG Sok-yong
  • Traduit par CHOI Mikyung et JUTTET Jean-Noël
  • Editeur: Zulma
  • 228 pages – Format: 14 × 21 cm – ISBN: 9782843042997
  • Parution: septembre 2004
  • Prix: 18,30€

Vous pouvez le trouver sur le site de l’éditeur (cliquez ici).


Description du livre

L’invité, c’est d’abord Ryu Yosop, pasteur coréen exilé aux États-Unis, amené à passer quelques jours en Corée du Nord pour y retrouver des membres de sa famille. Mais l’invité, c’est aussi un terrible fléau, importé en Corée par l’Occident : tant la variole… que les idéologies, porteuses de destruction et de mort.

Dans une forme littéraire audacieuse, inspirée d’un rite chaman destiné à consoler les âmes des défunts, Hwang Sok-yong revisite la période cruciale qui a précédé le déclenchement de la guerre de Corée. Les voix des vivants et des morts, victimes ou bourreaux, s’entremêlent – plaidant pour une réconciliation à travers le temps. Un récit halluciné, au caractère magique.

Mon opinion

Hwang Sok-yong est un auteur sud-coréen prolifique. Il a écrit de nombreuses œuvres – romans, nouvelles, essais – dont un certain nombre disposent aujourd’hui d’une traduction en français, parmi lesquels Au soleil couchant et Princesse Bari, que je vous présenterai prochainement, ou encore Monsieur Han, véritable chef-d’œuvre qu’il me tarde de lire.

Son talent d’écrivain autant que son engagement politico-artistique lui ont valu de recevoir de nombreuses récompenses au fil des années. C’est par exemple le cas de l’ouvrage que je souhaite vous présenter ici : L’Invité, écrit en 2001, qui lui a permis de recevoir le prix Daesan. Ce dernier, qui est l’un des trois prix littéraires sud-coréens les plus prestigieux du pays, récompense chaque année des œuvres issues des catégories suivantes : poésie, roman, drame, critique et traduction.

Mais autant cela aura contribué à son succès et sa popularité, autant cela lui aura aussi attiré des ennuis. Je l’avais déjà mentionné, un peu brièvement, dans ma critique de Sur la route de Sampo, il a été emprisonné à trois reprises : que ce soit pour avoir apposé son nom sur une œuvre relatant le soulèvement démocratique de Gwangju survenu dans les années 1980 ou encore pour s’être rendu en Corée du Nord pour promouvoir les échanges artistiques entre les deux pays.

C’est un homme qui n’a, semble-t-il, jamais renié ses convictions et qui accepte les conséquences de ses actes (il aurait pu échapper au troisième emprisonnement, étant parvenu à fuir le pays, mais est revenu de lui-même plus tard), et cela se ressent dans ses écrits. Il utilise sa propre vérité et sa propre histoire pour raconter des épisodes traumatisants pour la péninsule coréenne – autant le Sud que le Nord – à travers différentes histoires de fiction. D’ailleurs, selon certains spécialistes, ses œuvres peuvent être divisées en trois catégories : la première relate justement le traumatisme et les dégâts que peuvent engendrer la guerre et la modernisation forcée sur les vies humaines ; la seconde exprime davantage le désir de retrouver une vie saine et des valeurs perdues ; et la troisième regroupe les nouvelles historiques.

Mais en ce qui concerne L’Invité, difficile de décider dans quelle catégorie le classer, tant il regroupe des éléments de chacune d’entre elles.

Ce roman relate l’histoire d’un pasteur coréen protestant qui, après avoir émigré aux États-Unis pour fuir la prise de pouvoir des communistes en Corée du Nord, retourne passer quelques jours sur sa terre natal pour retrouver des membres de sa famille. Son voyage est aussi (et surtout), l’occasion pour lui de se repencher sur son passé et celui de sa famille au cours de la période qui a précédé le début de la guerre de Corée. Car cette période, aussi cruciale que méconnue en Occident, a vu se produire de terribles évènements avec lesquels il est difficile de faire la paix.

De tous les auteurs que j’ai découvert en empruntant des livres au hasard à la bibliothèque, c’est certainement HWANG Sok-yong que j’ai le plus apprécié. A ce jour, j’ai déjà lu trois de ses œuvres : Au soleil couchant, La route de Sampo et Princesse Bari. Et plus j’en lis, plus j’apprécie son style, sa vision et sa façon de raconter son histoire. C’est encore plus intéressant lorsqu’on connaît un peu son histoire personnelle, et que l’on parvient alors à déceler les similitudes avec certains de ses romans et récit. C’était le cas des autres livres que j’ai lu (sauf peut-être Au soleil couchant), et c’est sans aucun doute aussi le cas de ce roman.

J’ai particulièrement apprécié la trame choisie par Hwang Sok-yong : en calquant le déroulé du livre sur un rite chaman destiné à consoler les âmes des défunts, dont chaque étape constitue un chapitre du livre, il met en valeur le cheminement de pensée du pasteur, et la nécessité d’une réconciliation entre les deux parties.

Car le récit illustre parfaitement à quel point l’Histoire avec un grand H est toujours biaisée : c’est le récit des vainqueurs qui prédomine toujours, et ainsi, les Nord-coréens que le pasteur rencontre durant son séjour prennent bien soin de mettre en avant toutes les atrocités qu’auraient commis autant les chrétiens que les Américains avant et pendant la guerre – passant évidemment sous silence tout ce que les communistes ont pu faire.

Peu importe le conflit ou la guerre, aucun camp n’est jamais tout blanc, et dans une situation comme celle-ci, ou la population s’est retrouvée déchirée par l’idéologie, on peut deviner que bien des drames se sont produits. Ce récit du passé est véritablement bouleversant, donnant la parole à chaque camp successivement, sans jamais prendre de parti. J’ai aimé en apprendre plus sur l’histoire de la Corée, que je connais d’ailleurs assez mal hormis la guerre de Corée, et cela m’a donné envie d’approfondir le sujet.

Emprunt septembre 2021 – Fiche rédigé le 22/09/2021

Publié par Meana

Passionnée par les pays d’Asie du Sud-Est et leur culture depuis plus de 15 ans, j’ai voyagé en Chine, Corée du Sud, Japon et Taïwan. J’ai même vécu un an à Pékin ! Je m’intéresse particulièrement à la portée historique des lieux et concepts, et aux habitudes de vie asiatiques.

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