Du Palais impérial au Musée national du palais

Le Musée national du palais est un incontournable lorsque l’on visite Taipei, en raison de sa large collection d’objets, de meubles et de calligraphies.

Photographie de la grande porte (paifang), à travers laquelle on distingue au loin le bâtiment principal du musée
La première chose que l’on voit en arrivant devant le musée, c’est l’imposante porte chinoise, que l’on appelle 牌坊 paifang, qui laisse apparaître un peu plus loin le musée lui-même en haut d’un grand escalier.

L’ensemble des collections sont axées sur l’histoire et la culture chinoise/taïwanaise, dont une grande partie est issue des collections du musée du palais et du musée central national en Chine continentale ; c’est dans les années 1940 que le parti nationaliste, alors au pouvoir, a envoyé ces collections à Taïwan dans le but de les soustraire au parti communiste qui commençait à gagner du terrain.

Mais le musée national du palais ne présente pas uniquement ces objets, mais également d’autres objets, récupérés au fil des années, avant et après l’inauguration du musée en 1965. Certains de ces objets proviennent d’autres musées, de donations ou encore d’achats faits par le musée national du palais.

Selon le dernier inventaire, effectué fin 2022, il accueille un peu moins de 700.000 objets : bronzes, céramique, jades, tapisseries ou encore calligraphies, ils sont très variés. Leur seul point commun réside dans la zone géographique dont ils sont issus : ils retracent tous l’histoire et la culture de la Chine et de Taïwan.

Si vous n’y connaissez pas grand-chose, rassurez-vous : tous les panneaux explicatifs sont doublés en anglais. Il est également possible de louer un audioguide qui vous fournira toutes les informations en français (pour la modique somme de NT $150), ou de réserver une visite guidée (je crains qu’il ne vous faudra vous contenter de l’anglais dans ce cas).

Beaucoup de personnes utilisent cette deuxième option, ce qui se ressent lors de la visite du musée : lorsqu’un groupe arrive dans une pièce, il devient difficile d’apercevoir les objets exposés et le volume sonore augmente fortement.

Concernant les œuvres exposées, deux en particulier se démarquent du lot : le chou en jade 翠玉白菜 (Cuìyù Báicài), un morceau de jade sculpté du XIXe siècle prenant la forme du chou chinois, doté d’un criquet et d’une sauterelle camouflés dans ses feuilles, et le Rouxingshi 肉形石 (ròuxíngshí), un morceau de jaspe sculpté en forme de porc Dongpo datant du début du XXe siècle.

Photos de la Jadeite Cabbage et de la Meat-Shaped Stone
Jadeite Cabbage & Meat-Shaped Stone (Open Government Data License version 1.0)

Ces deux objets représentent à eux tous seuls le musée dans son ensemble et sont très célèbres. Malheureusement pour moi, le chou en jade avait été prêté à un autre musée lors de ma visite, je n’ai donc pu voir que la pierre en forme de viande.

Si arpenter les galeries du musée ne vous a pas complètement épuisé, plusieurs visites s’offrent à vous dans les environs : pourquoi ne pas aller se détendre au milieu des étangs et des pavillons dans les jardins de Zhishan ou de Chih-te (至德園 Zhide), ou encore découvrir la résidence de Chang Dai- chien, transformée en mémorial après son décès en 1983 ?

En ce qui me concerne, j’ai uniquement visité le parc Zhishan, dont l’entrée est très proche de celle du musée. Tout en longueur, il offre une agréable pause dans un écrin de verdure. Vous pourrez vous reposer à l’ombre des différents pavillons ou encore nourrir les carpes affamées de l’étang.

J’ignorais lors de ma visite qu’il y avait d’autres choses à voir à proximité, mais je me laisserai bien tenter lors de mon prochain voyage…

Bref historique

L’histoire commence bien avant la création du musée.

Il faut remonter jusqu’en 1925, un an après que le dernier empereur de la dynastie Qing, Puyi, ait été expulsé de la Cité interdite. Le gouvernement de Beiyang, en place depuis 1912, forme un comité dont la mission consiste à prendre en charge les nombreuses possessions impériales. Ce comité effectue un inventaire exhaustif des objets se trouvant dans le palais impérial, suite à quoi le musée du palace est inauguré et des expositions publiques organisées.

En 1928, à l’issue de l’expédition du nord, le parti nationaliste renverse le gouvernement de Beiyang et prend le pouvoir. Le musée du palais passe alors sous le contrôle du nouveau régime.

Au début des années 1930, le pays commence à ressentir la menace que représente son voisin, le Japon impérial. Ce dernier se sent prêt à étendre son empire et son influence, et après avoir quitté la Société des Nations, commence son expansion en envahissant la Mandchourie, une province de la République de Chine, en 1931. Après y avoir installé un gouvernement fantoche en 1932, à la tête duquel l’empereur Hirohito place Puyi, l’empereur déchu, l’armée japonaise cible la passe de Shanhai (山海关 Shān Hǎi Kuān) l’année suivante.

La passe de Shanhai est l’un des principaux passages de la Grande Muraille de Chine. Située à près de 300 km à l’est de Pékin, elle a servi d’avant-poste de défense en première ligne contre les différents peuples de la Mandchourie tout au long de l’histoire de la Chine.

Lorsqu’elle tombe aux mains de l’armée japonaise en 1933, la situation dans le nord-est de la Chine devient si précaire que le gouvernement chinois décide de déplacer la collection du musée du palais à Shanghai. Y sont ajoutés des objets issus d’autres endroits comme le Palais d’été, l’Academia Sinica et le Temple de l’agriculture.

En 1936, un entrepôt de stockage est construit dans un monastère taoïste à Nankin, la capitale de la République de Chine. Mais alors que l’incident du pont Marco-Polo (Pékin) en juillet 1937 marque le début de la guerre sino-japonaise, la prise de Pékin et l’avancée de l’armée japonaise vers le sud, les collections sont acheminées vers des villes plus à l’ouest. Ce qui leur permet d’éviter de tomber aux mains de l’ennemi lors du massacre de Nankin en décembre de la même année.

A la fin de la Seconde Guerre mondiale, les rénovations du musée du palais à Pékin et Nankin commencent, mais à l’automne 1948, alors que le parti communiste commence à prendre le dessus sur le parti nationaliste, les dirigeants du musée du palais prennent la décision d’envoyer les collections, et en premier lieu les objets et livres les plus rares et précieux, à Taïwan.

Les quelques 232.000 objets provenant du musée du palais et 12.000 venant du musée central arrivent de l’autre côté du détroit l’année suivante. Malgré un voyage terrestre et maritime en temps de guerre, ils n’auront subi que peu de dommage.

Petite ellipse dans le temps, nous arrivons en 1965, date à laquelle la construction du musée national du palais, tel qu’on le connaît aujourd’hui, s’achève.

Chiang Kai-shek, alors président de la Répubique de Chine, fait inscrire sur une tablette accrochée au-dessus de la porte les mots suivants : 中山博物院, qui se lit “Chung-shan Po-wu-yuan”. Par ce geste, il souhaite honorer la mémoire du père de la patrie, Sun Yat-sen.

Photo de la porte surplombée de la tablette, avec un gros plan de l'inscription
L’inscription 中山博物院, qui signifie littéralement “le musée de Sun Yat-sen” (CR: Corall & Meana, 2018)

Le musée est officiellement inauguré en novembre de la même année. Construit dans le style architectural des palais chinois, le musée est composé de quatre étages, rez-de-chaussée inclus, ornés de corbeaux et d’un toit aux tuiles vertes et au faîte jaune orangé. Les trois premiers étages du musée sont dédiés aux expositions, tandis que le quatrième étage accueille la maison de thé Sanxitang.

Dès 1967, soit à peine deux ans après son inauguration, le musée fait l’objet d’une première expansion. C’est durant cette phase d’expansion que la grande porte, que l’on appelle 牌坊 paifang, est érigée, ainsi que les colonnes ornementales. La grande porte est surmontée de l’écriture 天下為公 tiānxià wèi gōng, qui peut se traduire par “le monde appartient au peuple”. Cette figure idiomatique est tirée d’une citation du Classique des rites (que vous connaissez peut-être sous le nom Lijing ou Liking), une compilation d’ouvrages datant de la dynastie des Zhou (1046 – 206 avant notre ère).

Le musée fera l’objet de plusieurs autres expansions, en 1971, 1984, 1995. Ces expansions permettent au personnel du musée d’installer davantage d’expositions permanentes.

En 2004, le musée entre dans une phase de rénovation, à l’occasion de laquelle la structure du bâtiment est renforcée pour lutter contre les tremblements de terre. Les travaux se terminent en 2007.

Le musée national du palais dispose également d’une succursale dans le sud du pays, à Chiayi, dont le projet est lancé en 2003, et dont l’inauguration se tient fin 2015.

Informations pratiques

Nom en mandarin: 國立故宮博物院

No. 221, Sec 2, Zhi Shan Rd, Shilin District, Taipei City, Taïwan 111

111台北市士林區至善路二段221號

Site Internet: https://www.npm.gov.tw/

Le Musée du Palais est ouvert du mardi au dimanche, de 9h à 17h. Il est donc fermé le lundi, à quelques exceptions près : le musée est ouvert en cas de jour férié ou de long weekend. Le jardin Zhishan est, quant à lui, ouvert du mardi au dimanche, de 8h à 17h.

Le ticket d’entrée coûte NT $350, soit environ 10€. Comme dans beaucoup d’endroits, il existe des tarifs réduits : c’est par exemple le cas des groupes de plus de dix personnes (NT $320 par personnes), ou encore des étudiants internationaux (NT $150). A noter que l’entrée est gratuite pour les moins de 17 ans et les personnes en situation de handicap.

Par ailleurs, sachez qu’il n’est pas possible d’accéder au musée avec un sac à dos : des casiers sont disponibles dans le hall d’entrée.

Le jardin Zhishan est désormais gratuit (lors de ma visite en 2018, l’entrée coûtait NT $20). Concernant la résidence de Chang Dai- chien, je n’ai pas d’information sur le prix, mais il semblerait que la visite ne se fasse que sur réservation.

Date de la visite : 16 novembre 2018

Publié par Meana

Passionnée par les pays d’Asie du Sud-Est et leur culture depuis plus de 15 ans, j’ai voyagé en Chine, Corée du Sud, Japon et Taïwan. J’ai même vécu un an à Pékin ! Je m’intéresse particulièrement à la portée historique des lieux et concepts, et aux habitudes de vie asiatiques.

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