Le matcha et ses origines

Ce thé vert japonais connaît, depuis quelques années, un engouement certain en Occident. Et cela n’a rien de surprenant, considérant sa saveur si particulière, à la fois douce et riche, et ses nombreux bienfaits.

Mais est-il réellement japonais ?

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, il serait en réalité originaire de Chine. Durant la dynastie des Song (960 – 1270), des moines bouddhistes zen commencèrent à produire un thé en poudre, à partir d’une variété de thé vert, appelée gyokuro. Ce dernier était d’abord cuit, puis séché, avant que ses feuilles, appelées tencha, ne soient broyées en une fine poudre.

Le matcha, que l’on nomme shodai 抹茶 en Chine, ne fut introduit au Japon que quelques années plus tard, en 1191, par le biais d’un moine zen nommé Eisai. Et tandis que le thé matcha se faisait sa place au sein des monastères zen japonais, il perdit peu à peu sa popularité dans son pays d’origine.

Eisai, founder of the Rinzai School of Zen, 12th century.

Le maître zen Eisai (1141-1215), aussi connu sous les noms de Myōan Eisai et Eisai Zenji, est le fondateur de l’école rinzai au Japon. C’est à la suite d’un voyage en Chine entre 1187 et 1191 qu’il fut initié au zen rinzai par un maître chinois, et qu’il découvrit le matcha.

Comme pour tout ce qui fut introduit au Japon par le biais de la Chine, comme par exemple le bouddhisme ou les kanjis, le matcha connut un processus d’adaptation et de perfectionnement, avant d’intégrer pleinement la culture japonaise au XVIe siècle, lorsque le maître de thé Sen no Rikyū désigna le matcha comme étant le thé à utiliser dans le chanoyu, la cérémonie du thé japonaise.

Chiyoda Inner Palace – No. 20 Flower Arranging in Turn (Chiyoda no Ōoku Chanoyu mawaribana), Hashimoto Chikanobu, 1895, MET Museum

Cependant, le processus de création du matcha étant relativement complexe, il était l’apanage de la seule noblesse nippone, rares étant ceux qui pouvaient se permettre un thé aussi coûteux. Ce n’est qu’en 1738 qu’un procédé de fabrication beaucoup plus efficace, la méthode uji, fut inventé par Sohen Nagatani. Cette méthode, encore utilisée de nos jours, permit une adoption plus large à travers la culture japonaise et le reste du monde.

Le matcha n’en reste néanmoins pas moins coûteux, son prix étant généralement un gage de qualité : le matcha bon marché est en effet rarement d’une très bonne qualité, et est beaucoup plus amer qu’un matcha de bonne qualité.

Mais pourquoi un tel engouement s’il est si coûteux ?

Tout simplement parce qu’il possède de nombreux bienfaits. Il était autrefois utilisé comme remède par les hautes classes de la société japonaise, et les samouraïs en consommaient avant les batailles parce que cela leur procurait une énergie durable et améliorait leur vivacité mentale.

Très riche en catéchines, un antioxydant qui renforce le système immunitaire, il réduit les risques de cancer et de malades cardiaques et diminue à la fois la pression artérielle et l’absorption du cholestérol.

La catéchine améliore également la santé buco-dentaire. Et son action antioxydante ne s’arrête pas là : le matcha est réputé au Japon pour lutter contre le vieillissement de la peau et notamment contre l’apparition des rides.

Il contient également de la vitamine A, C et E, et pourrait prévenir certaines maladies dégénératives, comme l’Alzheimer, grâce à son taux élevé en flavonoïdes.

Le matcha contient également de la L-théanine, un acide aminé réputé pour réduire l’anxiété et le stress, et pour aider à atteindre un état de relaxation. Cet acide aminé aide également à stimuler la production d’acide gamma-aminobutyrique (GABA), ce qui permet d’améliorer la qualité du sommeil. En améliorant également la concentration, on comprend vite pourquoi les moines zen en consommaient avant la méditation !

Selon différentes études menées par des universités et chercheurs japonais, le matcha aiderait également à soulager l’arthrite et certaines inflammations, et permettrait une meilleure endurance (de 8% à 24% en dix semaines) en augmentant l’utilisation des graisses comme source d’énergie.

Évidemment, tous ces bienfaits vantés sont à prendre avec précaution, car ce n’est pas une potion magique. Il est important d’en consommer avec modération, et de l’accompagner d’une alimentation et d’un mode de vie sain, sans quoi il perdrait tout ses bienfaits.

De la production à la consommation

Avant de passé à la préparation et la consommation du matcha, voici quelques précisions sur sa production. Trois semaines avant la récolte, les buissons de thé sont couverts pour les protéger de la lumière directe du soleil.

Traditionnellement, on utilisait des nattes en bambous et en paille de riz pour filtrer la lumière, mais de nos jours, on se sert plutôt de tonnelles ou de bâches en nylon.

Thé d’ombre, 27/12/2019, @Diz (teapedia.org)

Cette culture ombragée permet de ralentir la photosynthèse (et donc la croissance de la plante), rend ses feuilles plus sombres et renforce la production d’acides aminés qui adoucissent le goût du thé et élèvent son taux en catéchines.

Toute la récolte se fait à la main. Pour obtenir un thé de bonne qualité, on ne sélectionne que les plus jeunes pousses qui contiennent la majorité des antioxydants. Puis, à l’instar de tous les thés verts japonais, les feuilles sont chauffées à la vapeur, ce qui permet de stopper les enzymes responsables de l’oxydation et obtenir un thé vert. Après séchage, les feuilles sont broyées lentement avec une meule de pierre pour obtenir une très fine poudre vert vif.

Contrairement à un thé infusé, cette méthode permet de consommer l’intégralité de la feuille de thé, ce qui apporte une quantité d’antioxydants bien plus importante : 137x plus que dans un thé infusé !

Pour le consommer, il suffit de mélanger une petite quantité de poudre de matcha (souvent une cuillère à café rase) avec une petite quantité d’eau à 70/80°C, et de mélanger avec un fouet en bambou, que l’on appelle un chasen. On peut ensuite incorporer le mélange à davantage d’eau chaude ou à du lait, selon les convenances de chacun.

Mais il ne se consomme pas que en boisson, il se décline sous de nombreuses formes, pouvant être incorporé dans de nombreuses préparations, comme des mochis, des glaces ou des gâteaux par exemple.

Vitrine du Shodai Matcha (Paris)

Quelques adresses parisiennes

Shodai Matcha, 7 Rue Volta, 75003 Paris

TOMO, 11 Rue Chabanais, 75002 Paris

Umami Matcha Café, 22 Rue Béranger, 75003 Paris

Publié par Meana

Passionnée par les pays d’Asie du Sud-Est et leur culture depuis plus de 15 ans, j’ai voyagé en Chine, Corée du Sud, Japon et Taïwan. J’ai même vécu un an à Pékin ! Je m’intéresse particulièrement à la portée historique des lieux et concepts, et aux habitudes de vie asiatiques.

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