Un paradis

  • Titre du livre: Un paradis
  • Auteur: SHENG Keyi 盛可以
  • Traduit par Brigitte DUZAN et ZHANG Xiaoqiu
  • Editeur: Philippe Picquier
  • 189 pages avec illustration couleur – ISBN: 9782809715484
  • Parution: 06/05/2021

Description du livre

A Shanghai, une jeune femme simple d’esprit décrit de l’intérieur la vie de femmes enfermées dans une clinique pour mères porteuses illicite qui tient autant du camp militaire que de la maison close. Face à la violence des hommes, elle montre la solidarité entre les prisonnières, désignées par des numéros mais qui s’attribuent entre elles des noms de fruits.

Mon opinion

SHENG Keyi est une romancière, nouvelliste et artiste chinoise contemporaine née dans les années 1970. Elle commence à écrire en 2002.

Ses œuvres ont toutes (ou presque ?) une chose en commun : elles traitent de la vie réelle des classes les plus défavorisées de la population chinoise, et en particulier la situation souvent plus que précaire des femmes.

Tant son engagement que sa plume lui ont non seulement valu de nombreux prix, dont le Prix de littérature du peuple chinois, le Prix Yu Dafu de la fiction, le Prix des médias de littérature chinoise et le Prix des 20 meilleurs romanciers du futur, mais aussi d’être saluée par ses confrères auteurs chinois Mo Yan, Yan Lianke (l’auteur du Rêve du village des Ding) ou encore Yu Hua (l’auteur de Brothers).

Ses livres ont fait l’objet de traduction dans de nombreuses langues, l’anglais et le français, mais aussi le japonais, le suédois ou encore le polonais. Une telle diversité dans les langues de traduction montre à quel point sa plume est appréciée à travers le monde entier. D’ailleurs, elle a été interviewée dans plusieurs publications internationales, comme la New York Review of Books, The Guardian, le Wall Street Journal, mais aussi Libération et Le Monde diplomatique.

En français, on retrouve donc le roman court Un Paradis (《福地》, Shanghai : Harvest Magazine, 2016), ainsi que Le Goût sucré des pastèques volées (《还乡书》, Pékin : Peking University Press, 2018), tous les deux aux éditions Picquier.

Certains de ses romans ne sont pas disponibles en Chine continentale. C’est par exemple le cas de Death Fugue, non traduit en français, une allégorie politique qui lui a valu d’être interdit de publication. Autre exemple, l’un de ses derniers romans, The Metaphor Detox Center, également non traduit en français, qui fait partie d’une trilogie, a dû être publié par l’éditeur taïwanais Linking Publishing.

Un paradis raconte l’histoire de Pêche, une jeune femme simple d’esprit qui se retrouve sans le vouloir dans une clinique illégale de mères porteuses. Les autres femmes présentes sont rémunérées pour porter des enfants qui seront vendus à des couples riches, mais pour le directeur de la clinique, Pêche représente de l’argent facile ; elle ne comprend rien à la situation, et n’ira pas réclamer quoi que ce soit.

En chinois, ce roman s’appelle 福地 fúdì. Cela désigne la demeure des immortels dans le taoïsme, et un lieu saint où prier Bouddha dans le bouddhisme ; c’est donc une terre bénie des dieux, un paradis. Et c’est justement ainsi que le directeur considère sa clinique : un paradis pour les femmes, qui elles la voient davantage comme un enfer.

Mon avis est un peu partagé.

Tout le récit passe par la narratrice qui est un peu simple d’esprit. Elle est facilement distraite, passant de la réalité à un souvenir d’enfance sans transition, et ne comprend pas vraiment ce qui se passe autour d’elle la plupart du temps. C’est parfois un peu déconcertant, et ça n’aide pas à suivre le récit.

D’autant que le thème abordé est difficile. Être mère porteuse dans une clinique illégale en Chine dans les années 2010 n’est pas une situation très enviable. Même si la plupart des femmes qui y sont semblent l’être de leur propre volonté, la clinique tient davantage lieu de prison tant les règles sont strictes et les libertés réduites. Ces femmes ne sont que des produits qui permettent au directeur de gagner de l’argent, d’ailleurs, il ne les désigne que par leur numéro.

Cela aurait pu être une lecture angoissante et sordide, mais le récit qu’en fait Pêche a un côté presque poétique. Un aspect qui est d’ailleurs entretenu par les aquarelles faites par l’autrice spécialement pour l’édition française, et qui ponctuent le récit.

En voici quelques exemples que j’ai particulièrement appréciés :

On peut donc dire que c’est une façon d’en apprendre plus sur ce sujet difficile tout en douceur. L’histoire elle-même ne me laissera pas un souvenir impérissable, mais ce livre m’aura ouvert les yeux sur une face assez sombre de la société chinoise.

Emprunt à la médiathèque janvier 2022 – Fiche de lecture rédigée le 17/04/2022

Publié par Meana

Passionnée par les pays d’Asie du Sud-Est et leur culture depuis plus de 15 ans, j’ai voyagé en Chine, Corée du Sud, Japon et Taïwan. J’ai même vécu un an à Pékin ! Je m’intéresse particulièrement à la portée historique des lieux et concepts, et aux habitudes de vie asiatiques.

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